Crédit immobilier: les futurs acheteurs peuvent-ils espérer de bonnes nouvelles?
Alors que les prix de l’immobilier ne baissent pas assez, les ménages espèrent une baisse des taux de crédit.
«Nous sommes solvables et pourtant notre demande de crédit a été refusée.» Comme Laurent et Sophie, qui gagnent à deux 4700 euros nets par mois, plusieurs centaines voire milliers de dossiers sont bloqués malgré leur situation financière confortable. La raison ? Aujourd’hui, ce n’est pas la faute du taux d’usure, ce fameux taux légal au-delà duquel une banque ne peut pas prêter, et qui a causé des misères à plusieurs milliers de ménages il y a un an. Ce qui coince depuis des mois, c’est le taux d’endettement, c’est-à-dire ce que pèse le coût de votre crédit sur vos revenus disponibles. Cet indicateur, qui sert aux banques pour accorder ou non un prêt, ne doit pas dépasser 35%. Sauf si vous faites partie des 20% de dossiers qui peuvent déroger à cette règle imposée aux établissements financiers par les autorités financières depuis près de trois ans.
Problème : les banques ne semblent pas très enclines à utiliser cette poche de 20%. «Nous n’y comprenons rien, c’est une vraie usine à gaz !», déplore le conseiller d’une grande banque. Résultat : la part de dossiers dérogatoires s’élève à seulement 70%. De quoi agacer les autorités financières. Pour y remédier, le HCSF a pris des mesures: les emprunteurs pourront emprunter sur 27 ans pour un achat dans le logement ancien. Mais à une condition : ils devront s’engager à réaliser des travaux – énergétiques ou pas – qui devront représenter au moins 10% (et non plus 25%) du coût total de l’opération. De quoi donner une petite bouffée d’air aux futurs acheteurs. «Si les banques n’augmentent pas leur taux, ce gain de deux ans peut permettre à un ménage qui gagne 3500 euros à deux et emprunte 200.000 euros, d’économiser 45 euros par mois, soit près de 15.000 euros sur 27 ans», analyse Sandrine Allonier, de Vousfinancer.
Autre mesure : le crédit relais (acheter un nouveau logement avant de vendre le sien), qui ne représente que 8% de la distribution de crédit, n’entrera plus dans le calcul du taux d’endettement qui s’en trouvera ainsi allégé. De quoi inciter plus de ménages, qui s’étaient autocensurés, anticipant le refus de leur banque, à demander un prêt ? «Cette mesure pourrait permettre à des secundo-accédant (qui achètent un logement pour la deuxième fois ou plus) de libérer des logements accessibles pour les primo-accédants qui au lieu de rester locataires et bloquer le marché locatif, pourront ainsi accéder à la propriété».
Geler la règle des 35% d’endettement
Enfin, dernière annonce : un emprunteur, qui se sent lésé et conteste le refus de sa banque, peut demander une révision de sa demande. De quoi graver dans le marbre un taux officiel de refus des banques que seuls les courtiers diffusent depuis le début de la crise immobilière. Deux bémols à cette mesure et non des moindres : il ne s’agit que d’une recommandation des autorités financières et non une obligation. Cette procédure ne sera lancée que si l’emprunteur le demande. Par ailleurs, la tierce personne qui réexaminera votre demande, fait partie intégrante de la banque. Osera-t-elle contredire le comité de direction de l’établissement financier ? «Elle se contentera simplement de donner plus d’explications à l’emprunteur», estime un expert du courtage immobilier. «Je ne pense pas que cette procédure fluidifiera le marché, bien au contraire, elle ne fera qu’amplifier sa morosité, surtout si elle dure dans le temps», déplore Guillaume Martinaud. Selon nos informations, la banque devra respecter un délai maximal, qui sera fixé «début janvier», selon une source proche du HCSF, avant de répondre à la sollicitation du ménage.
Pour Maël Bernier, de Meilleurtaux, les autorités financières «n’ont pas renversé la table». «La mesure la plus efficace aurait été de geler les mesures HCSF (taux d’endettement limité à 35%, durée d’emprunt inférieure ou égale à 25 ans). Par ailleurs, il est hypocrite de dire que les banques ne prêtent plus alors qu’elles accordent moins de crédit à cause des mesures HCSF», analyse cette spécialiste du marché du crédit. Le président de la FNAIM regrette, par exemple, que l’allongement de la durée d’emprunt ne soit pas appliqué à tous les achats immobiliers, avec ou sans travaux. Il suggère plutôt qu’un propriétaire puisse conserver, pour financer sa nouvelle acquisition, l’emprunt qu’il a contracté pour le bien qu’il souhaite revendre. Pas sûr que les banques acceptent qu’un ménage emprunte à 1% ou 1,5% un nouveau bien alors que les taux sont trois à quatre fois supérieurs actuellement. Bref, pour les professionnels, cette réunion du HCSF, c’est encore un rendez-vous raté. «Je finis par croire que le gouvernement espère que le marché s’autorégulera. Autrement dit que les vendeurs finiront par baisser leur prix. Ce qui n’est pas le cas : ils n’ont reculé que de 3% en un an», note Guillaume Martinaud. Car, comme beaucoup d’observateurs le disent, le problème n’est pas lié qu’à la hausse des taux – on a connu des taux à 4% au début des années 2010 – mais l’absence de vraie baisse des prix.